Voici venir le temps de l'Îlot Savon…

Au fond d’un petit couloir éclairé par des lumières douces, on débouche dans une cour intérieure où chantent des oiseaux et coule une fontaine le long d’un mur. L’air embaume des parfums de savons multicolores des étagères, un chat gris, étendu de tout son long, sommeille d’un œil tout en observant les clients discrètement. Nous sommes à "L’îlot savon" , la fabrique de savons de Gréoux-les-Bains, où officient Patricia et Cyrille Viard, artisans maîtres savonniers.

Dans une autre vie, Cyrille travaillait à la Caméra invisible. Il a aussi été l'un des fondateurs de la radio R.F.M. Une vie mouvementée. Patricia avait plus sagement choisi la branche cosmétique. Ils sont arrivés il y a 12 ans à Gréoux. « Nous voulions un petit truc au soleil. On n’a jamais autant travaillé… », remarque Cyrille en rigolant. Patricia renchérit : « L’été, on est censés vendre ce qu’on a fabriqué l’hiver, quand il y a moins de monde, mais il faut croire que nous n’avons pas fabriqué assez, ou alors que la clientèle a augmenté, parce nos stocks ont sérieusement diminué. » Le succès est mérité : les savons sont faits sur place, avec des parfums classiques, chèvrefeuille, lavande, verveine, mais aussi inédits, comme le coquelicot, la fraise des bois, l’amande des tropiques ou le frangipanier. « Nous vendons aussi du savon d’Alep, le plus vieux savon du monde, créé il y a 3 500 ans, qu’ont ramené les croisés d’Orient, et aussi du savon de Marseille, qui est un dérivé du premier, mais fabriqué dans la région marseillaise. Lui aussi est purement végétal, fabriqué à partir d’huile d’olive. »
L’îlot savon est devenu en peu de temps un des passages préférés des curistes et des touristes. Un savon est un petit cadeau pas cher et facile à ramener, et on peut le voir se fabriquer dans la pièce à côté, le laboratoire. C’est là que s’effectue la préparation des savons cosmétiques. « C’est une préparation longue et compliquée », précise Cyrille, penché au-dessus d’une machine qui expulse de longs pains de savon rose qui embaument le litchi. « Tout est dosage : le mélange de la pâte à savon, des arômes et des colorants naturels provenant de plantes ou de minéraux, puis le passage à la malaxeuse, suivi du mélange définitif. » Un coup d’œil, Cyrille hume le résultat, et les copeaux repartent pour un tour dans la machine. Ils passeront une dizaine de fois avant d’aboutir au résultat espéré. C’est un savon unique, une sorte d’œuvre d’art qui mélange utile et plaisir. L’esthétique est de rigueur, aussi. L’îlot savon propose des savons en forme de voitures, de fleurs, de calissons, de camées, de sushis… C. Viard nous a même créé spécialement une surprise : un savon en forme de bateau, au parfum de rivière fraiche. Comme le Gardon.